Oursins et crustacés

=> suite de : Chez moi chez nous?

La journée avait été longue et la marche aussi. Raphaël avait un logement caché depuis peu et un sombre colocataire... et peut-être même un local pour travailler au village! Le tout était maintenant de préparer ses réserves en tous genres.

Il avait observé la forêt et remarqué quelques plantes connues pour la préparations de remèdes basiques tels que : anti-vomitif ou vomitif, anti maux de tête, de ventre et anti-bactérien...
Une pauvre découverte en soit, puisque Fanellia et Empyrea possédaient déjà ce genre d'onguents ou plantes, mais au moins il en aurait de coté pour les villageois en manque de doliprane... herm. Et pas besoin de demander. Un médecin qui ne demande pas à ses collègues de quoi le dépanner est un médecin fort! Huhu...

C'est sous un soleil de plomb, passé seize heures de l'après midi, que le médecin patauge dans l'eau. Par 'patauger' j'entends par là qu'il a remonté son short blanc au dessus de ses genoux, se trempe pieds nus jusqu’aux mollets, le dos voûté et bras en action afin de débusquer d'entre quelques rochers des oursins tant convoités.

A ses côtés, dans les quelques rochers qui pointent en dehors du sable sur la plage, il remplis un trou d'eau pour y collecter les quelques oursins déjà arrachés à leur 'nid'.
Raphaël se redresse en soufflant, passant son bras sur son front pour l'essuyer de la sueurs qui y perle.
Se penchant à nouveau vers l'eau il se débarbouille et prend appuis contre les rochers dans son dos pour se hisser assit sur eux.
Se tournant vers ses cinq oursins prisonniers, il prend le temps d'en détailler un au creux de ses doigts et lui arrache une épine afin de l'observer minutieusement.

"Et hop! Ce qu'y a de bien avec le retour à l'âge primaire c'est qu'il faut se démerder pour faire son matériel...
Merci Dieu d'avoir faire à mes amis les oursins de belles épines creuses pour les transfusions en tout genre." lache-t-il d'une voix chantée dans un soupire surjoué en relevant le visage vers le ciel.

Sortant un petit couteau de l'une de ses poches, il ouvre l'animal en deux, évitant de se piquer sur son venin pour manger l'intérieur au goût prononcé d'iode.
Grimaçant légèrement, il avale et ajoute d'une voix plus crispée:

"Et merci aussi pour ces vitamines goûteuses... kof!
Ha merde, je rêve d'un restaurant sur cette île paumée..."

Soufflant en se relâchant, il observe autour de lui, à l'affut de l'approche d'un naufragé ou peut-être... d'un villageois...

"Faut que je trouve de la glaise..."

Fanellia avait depuis peu un nouveau compagnon de chambre. Seulement ce dernier plutôt turbulent et surtout bruyant commençait à parfois la fatiguer légèrement, surtout en fin d'après-midi ! Profitant d'une pause bien méritée, elle avait décidé d'aller se promener sur la plage, laissant ses pieds jouer de l'écume mourante sur le sable chaud. Contente d'avoir pu troquer de la viande la veille, elle n'avait pas trouver Raphaël au village, n'ayant aucune idée de sa nouvelle adresse... Il faut avouer qu'elle ne s'était pas non plus attardée à l'auberge.

Marchant tranquillement, face au vent, alors que ses pensées dérivait vers Raphaël et les autres habitants de l'île qu'elle appréciait, elle aperçut la silhouette devenue familière du médecin. Esquissant un léger sourire, elle s'approcha sans chercher à ses dérober à son regard ou à se faire plus bruyante dans son approche. Arrivant finalement à son niveau elle découvrit le début d'un long génocide chez nos amis les oursins. Amusée, elle lança :
« J'espère que tu vas varier ton alimentation ! » Lui faisant un sourire plus franc, elle ajouta plus doucement :
« Bonsoir ? »

Elle regarda tout autour d'eux, comme pour vérifier que personne n'était autour puis ajouta :
« Il est rare de croiser quelqu'un aussi tard ! Qu'est-ce que tu fais ici tout seul ? » Le ton semblait léger sans aucun reproche, une façon d'engager la conversation. Puis relevant les pans de sa robe légère, elle s'installa à ses côtés, lançant un regard aux pauvres crustacés...

Raphaël allait ouvrir son second oursin pour ensuite s'amuser à les défaire de toutes leurs aiguilles pour les mettre de côté. Alors qu'il plaçait une moitié de coque dans le creux de sa paume, prêt à boire la créature encore vivante, il se fige à la voix qui l'interpelle, se retournant vers elle pour découvrir Fanellia:

"Hey c'est ma première protéine animale sur l'île depuis deux jours. Tu parles que je varie, j'donnerai tout pour un hamburger bien gras... et accessoirement un paquet de clopes..." souffle-t-il dans son jeu de l'instant présent.
"Bonsoir" répond-t-il à la suite du salut, juste après ce petit préambule de reconnaissance.

Raphaël engloutit son second oursin avant d'en proposer un, la bouche pleine, à fanellia.
Déglutissant il répondit à sa question:

"Ça s'voit? J'm'empiffre au buffet à volonté de la mer... et accessoirement je cherchai des aiguilles creuses pour faire de futures éventuelles transfusions. Ne me manque plus qu'un tube souple-herm... enfin j'avance petit à petit pour recréer du matériel 100% biologique...
D'ailleurs va falloir que j'parte à la pêche à l'omble dans le lac..." dit-il d'un air blasé à l'idée de devoir apprendre le chasse et pêche par cœur pour soigner ses patients sans utiliser la magie.

"Et toi tu te ballade? Quoi de neuf depuis la dernière fois..." Termine -t-il en haussant les sourcils sans quitter la demoiselle des yeux, jouant à arracher les aiguilles avec minutie des oursins dévorés.

Fanellia avait tranquillement rigolé. Haussant un léger sourcil elle avait rajouté :
« Je ne sais pas ce qu'est un hamburger... mais si tu veux... j'ai troqué de la viande hier ! Si tu manque tant de protéines, je pense que cela devrait mieux te convenir... ! »
Laissant flotter l'invitation, elle suivit les propos du jeune homme, ses pieds jouant du faible niveau d'eau.

Éclaboussant un peu sa robe, elle avait un sourire aux lèvres apparemment contente de le revoir. Une légère brise se leva, allant malmener les mèches rebelles de la jeune femme qui les replaça de manière distraite.
« Tu devrais guetter les naufrages... la plupart du temps il est possible de récupérer certains filets... cela pourrait-être utile pour la pêche... Quand à la chasse... un nouveau rescapé Big John est un chasseur... je suis certaine qu'il serait ravit de t'apprendre quelques rudiments ! C'est un homme si doux ! » dit-elle ayant un sourire attendrit à l'évocation de ce naufragé. Oui Big lui avait laissé une bonne impression... l'impression qu'elle pourrait avoir un véritable ami en cette personne.

Hochant ensuite de la tête comme pour marquer le suivit de la discussion, elle répondit en haussant légèrement les épaules :
« J'ai un nouveau locataire chez moi... Une petite fée... masculin ! » Elle roula les yeux :
« Une personne plutôt malicieuse... gentille, mais assez.... étouffante et turbulente. » elle secoua négligemment la tête, présentant sa paume de main levée pour repousser l'offre de l'oursin odorant et dégoulinant d'eau de mer :
« J'ai bien peur que ce petit alchimiste ne se fasse attraper et qu'il vienne à me poser problème s'il croise le chemin de Lucius... » Relativisant, elle finit par modérer ses propos :
« Enfin... au moins, il m'aide à faire améliorer mes récoltes... il à même une potion pour se faire aussi grand que toi ! » Elle rit :
« Il dors dans une boîte dans ma chambre ! Il m'a même dit qu'il paraîtrait que de dormir avec une fée portait chance ! »

Ne se rendant pas compte qu'elle avait sans doute passé à côté du sens fanfaron de la chose, elle retourna son regard sur le profil de Raphaël. Il est vrai que ses rencontres du moment était beaucoup plus masculine que féminine... d'ailleurs devrait-elle lui parler de Daeros ?... Curieusement, elle y rechignait... Elle ne savait pas encore quoi penser de Daeros... Son regard se portant instinctivement sur le phare, elle devint un instant pensive.

Raphaël esquissa un sourire lorsque Fanellia exposa son ignorance culinaire à sa demande peu sérieuse.
Il détacha une aiguille d'oursin en écoutant la suite de son discours, détendu dans sa situation actuelle.

"Guetter des naufrages?" répète-t-il en levant le visage t le regard sur l'horizon l'air songeur. "Ce serait bien mal penser que d'espérer qu'un navire échoue par là pour contenter un besoin matériel..."
*J'vais retomber dedans c'est sûr... ça va me poser problème pour la suite de ce que j'ai à faire, j'dois m'imperméabiliser.*

La référence Big John lui fit reporter l'attention sur Fanellia, étirant un sourire en levant les sourcils d'un air peu convaincu:

"Ha ouais Big John? Vraiment? J'doute pas de ton impression mais avec un nom pareil il aura intérêt à avoir de l'humour, sinon on va pas être pote lui et moi..." il souffle une sorte de rire avant d'en revenir à son travail minutieux.
Perdent légèrement son sourire à sa concentration, il écoute d'une oreille les explications de Fanellia, répétant sans la regarder:

"Une fée mâle-hein? J'ai eu le même genre de... contact sur l'ancienne école où tu étudiais et ou j’exerçais. Une Bulle Cristaline qui me collait partout, j'crois qu'elle avait le béguin pour moi.
Elle réussissait à prendre une taille plus humaine, mais restait bloquée à l'âge enfantin... donc j'étais pas trop fan. J’avais l'impression d'être pour elle le moniteur de collo dont toutes les gamines tombent amoureuses...
Faut juste vite dissiper le doute malsain qui peu naître dans l'esprit des gens-quoi...
T'as trouvé ton cupidon miniature, alors?" lâche-t-il en retrouvant le sourire.

Voyant que la discussion venait de trouver ses réponse, il se tourne entièrement vers Fanellia laissant l'oursin tranquille dans la paume de sa main, quelques aiguilles récoltées à ses côtés.

"Pas de rencontres hasardeusement mauvaises? Genre... de lien de parenté?" dit-il avec méfiance. Ce problème que Fanellia semblait soulever, en lui ayant avoué que depuis quelques temps plus de naufragés étaient recensés, dont son frère... n'était pas pour rassurer ses propres projets sur l'île.

Fanellia avait doucement commenté :
« Malheureusement les naufrages sont fréquents... il y en a tellement eut depuis que je suis ici... avec des rescapés ou non ... » Affaissant un peu ses épaules, son regard s'était de nouveau tourné sur le visage du médecin qui la regardait, ce dernier doutant légèrement des dires de la demoiselle concernant Big.

Sa moue des lèvres se transforma en sourire : 
« Big est vraiment charmant ! Son nom correspond tout à fait à son physique, une grosse brute, mais au cœur d'or ! Il est sans contexte l'homme le plus polit et attentionné que j'ai pu rencontrer jusqu'à présent ! »
Puis la suite des propos la firent rougir :
« Loin de moi cette pensée ! » se récria-t-elle tout en se redressant brusquement levant ses paumes en l'air comme pour appuyer sa défense.

Se détendant légèrement par la suite, elle repassa une mèche de cheveux derrière son oreille, les joues encore rose de timidité.
« Je n'ai rien fait qui puisse être interprété de manière douteuse... Quand à Cupidon.... je ne pense pas en avoir... enfin je ne crois pas... je ne sais pas...» laissa-t-elle flotter se remémorant certains baisers. Raphaël allait-il se défendre de son droit au post ? Elle n'en savait rien. De nouveau son regard se porta sur le phare...

Rabaissant ses iris sur l'eau qui miroitait à ses pieds, elle inspira pour dissiper son trouble intérieur pour ensuite répondre :
« Non je n'ai pas revu cet étrange homme... et les derniers rescapés ne semblent pas me connaître... pourquoi... ma famille est-elle aussi vaste et néfaste que cela ? » demanda-t-elle une pointe de curiosité la piquant. Après tout elle devait bien avoir des parents... ou d'autres frères et sœurs non ?

La personne la plus charmante et attentionnée rencontrée jusqu'à présent? La remarque fait tiquer Raphaël qui hausse un sourcil sur un visage défroissé par l'interrogation. Rivant cette attention toute particulièrement dessinée sur son expression vers Fanellia, il la sonde rapidement.
La reprise soudaine de la jeune femme à cet échange de regard douteux lui redonne le sourire:

"Haha... enfin si c'est le cas, ça veut dire que j'ai encore des efforts à faire. Humf!" soufflant une nouvelle fois son rire, il baisse le visage sans défaire le sourire agrandit aux coins de ses lèvres.

Entendant le doute dans la voix de la jeune femme, Raphaël reporte sur elle une attention plus attentive, suivant le regard qu'elle lançait vers le phare, dans son dos. Se contorsionnant d'avantage pour voir ce qu'elle observait, il palit légèrement.

"Pourquoi tu regarde ce phare abandonné... Tu projettes de t'y installer?" lui lance-t-il avec un demi sourire, retournant à son occupation première.
Son esprit se combla de doutes et de souvenirs récent, de pensées, de craintes. Ses sourcils se froncèrent légèrement alors qu'il collectait d'autres aiguilles.

"D'ailleurs tu sais quelque chose sur ce phare?" demande-t-il l'air le plus naturel du monde...
C'était bien là bas qu'il avait arraché Aigracier à un vampire dont le nom lui était inconnu, et que Fanellia regarde dans cette direction lui laissait l'impression qu'elle savait quelque chose... Sinon pourquoi le regarder? Ça ne devait pas être la première fois qu'elle le remarquait, ce phare.

La question que Fanellia se posa à elle-même sur sa famille fit sourire le médecin qui reporta sur elle un regard compatissant:

"Ça j'connais aussi, et malheureusement on ne choisi pas sa famille... enfin la mienne n'est pas si vaste, c'est du genre concentré."
*Et surtout trépassé...*

'Encore des efforts à faire...' ce petit bout de phrase laissa Fanellia pantoise. Qu'entendait-il par là ? Est-ce qu'il se revendiquait comme étant son cupidon ? Pas bien sûr, elle se contenta de le regarder à la dérobée, mais seul son sourire détendu s'offrit à elle sans lui donner plus d'indication sur les sentiments du jeune homme. D'ailleurs si elle n'arrivait pas toujours à le décrypter lui en revanche avait noté ses regards fréquents en direction du phare.

Se raidissant légèrement, elle plongea son regard dans l'eau sableuse qui voilait ses orteils. Laissant un léger silence passer, elle répondit finalement, le ton un peu plus sérieux qu'elle ne l'aurait voulu :
« Non... le phare est juste un endroit dangereux pour qui s'y aventure trop près. » Elle ne voulait pas que Raphaël le voit, après tout... si Daeros était son ancien amant, il ne valait mieux pas qu'il rencontre Raphaël qui était en ce moment l'une des personne qui lui était la plus proche.

Ses iris cillèrent légèrement, la jeune fille venant observer le visage encadré de mèches blondes du médecin. Oui... Raphaël était une personne dont elle s'était rapproché naturellement... et elle aimait à être si proche de lui, s'était incontestable.
« Je sais seulement que quelqu'un y vit, une personne qui n'apprécie guère y être dérangé. » dit-elle pour attester le danger de vouloir rencontrer une telle personne.

N'en disant pas plus, elle hocha lentement de la tête sur la remarque familiale, se détendant finalement.
« Alors finalement toi et moi... on est un peu notre seule famille à nous deux ? » dit-elle plus légèrement, laissant l'interrogation le titiller une nouvelle fois sur la réelle nature de leur relation.

Raphaël collecta une dizaines d'aiguilles dans sa main avant de les rassembler et les reposer sur le côté, contre la roche séchée. Il délaissa sa moitié d'oursin mort pour en prendre un plus vivant et s'offrir un nouvel encas.

La première réponse de la jeune femme le laissa dubitatif. Il l'observa de biais avant de tourner son visage et de demander avec un sourire un peu crispé:

"Ha? Et tu le regarde depuis toute à l'heure pour te souvenir que c'est un endroit dangereux?" Le ton de sa voix sur l'interrogative ne demandait pas vraiment de réponse, visant plutôt à noter que cet argument qu'elle lui offrait ne l'avait pas vraiment convaincu.

Lorsqu'elle lui révéla qu'un être y vivait il reposa un regard et un visage de biais, buvant sa moitié d'oursin avant de répondre:

"Ha ce gars là? Ouais j'l'ai rencontré...." répondit-il dans l’optique de savoir de qui Fanellia voulait parler.
"Un gars brun, assez bien bâtit, ouais... j'l'ai vu ce matin... J'me suis perdu dans la forêt et j'ai atterri vers le phare. J'l'ai rencontré dedans, il avait l'air pas très bien d'ailleurs."

Des généralités qui indiqueraient sûrement une voie à prendre en fonction des réactions de Fanellia à cette révélation, sur un quiproquo. Et si ce vampire avait été blond ou roux et bien tant pis, Raphaël avait logiquement une chance sur trois de taper juste.
Aigracier? Il ne l'avait pas jugé dangereux, même si excommunié. Il doutait d'avantage sur ce soit disant vampire qui en avait fait son calice et qui ne s'était pas montré. Fanellia le connaissait-elle? Ou n'avait-il pas su détecter la dangerosité d'Aigracier? Il ne lui avait pas semblé que sa présence le dérange.
Fanellia l'aiderait à mettre le doigt sur la réponse à son doute.

Le sujet familiale le fit à nouveau sourire calmement avant de répondre d'un ton plus distant, mélancolique:

"'Sûr que sur cette île coupée du monde à tout point de vue... les orphelins sont encore plus orphelins et ceux qui ne le sont pas peuvent se sentir encore plus seul.
On forme tous une famille... Et toi et moi, c'est encore différent." achève-t-il avec un sourire plus franc.

Fanellia n'était pas dupe... bien que les descriptions vagues données correspondaient, elle percevait bien le petit manège de Raphaël, aussi dans un soupir concéda-t-elle à lui dire ce qu'elle savait. Par contre le fait de savoir que le médecin ait rencontré une potentielle victime de Daeros fit tiquer légèrement la jeune femme. Se passant une main dans la nuque, elle lui retourna un regard de coin puis lâcha :
« Je ne pense pas que ce soit le locataire du phare que tu ais rencontré... Le matin c'est même impossible... il ne sort que la nuit. »

Croisant ses deux mains sur ses genoux, elle ajouta :
« C'est un être magique qui habite maintenant le phare... un ancien de l'école je crois. Il s'appelle Daeros. Je ne l'ai rencontré qu'une seule fois mais cette unique fois m'a suffit pour me conforter dans l'idée que c'était un être incontestablement dangereux. Seulement... en attendant qu'il trouve un autre endroit pour vivre... j'évite de parler de lui... le phare n'attire guère les gens de toute façon. »

N'en rajoutant pas plus, et avec le soleil qui tendait sa course vers le sol, cette justification pouvait paraître bien plus plausible, révélant une crainte non simulée par la jeune femme. Cette dernière n'ayant pas encore pris sa décision concernant son point de vue sur le vampire.. Il était dangereux, ça elle en était certaine et elle le craignait... Grandement. Mais en même temps... Ses révélations au sujets de leur relation... son charme irrésistible... Tout cela rendait la demoiselle plus qu'indécise et d'autant plus encline à ne pas se prononcer sur lui tant qu'elle-même ne serait pas au clair dans ses pensées.

Se tournant à demi vers le médecin, elle le regarda plus franchement.
« Toi et moi c'est encore différent... mais dans quel sens ? » demanda-t-elle cette fois sans détour, s'appuyant d'une main sur le rocher sec et coupant. N'accordant plus aucun regard sur le phare, elle espérait qu'il oublierait Daeros et ne lui poserait plus de question.

Le médecin cilla sans expression, observant Fanellia qui semblait avoir deviner son petit jeu de quiproquo facile.
Mais lorsque le nom de Daeros tomba avec le lien à leur passé commun à Daimos, il sentit une onde lente et froide lui remonter le long de l'échine, comme un vent de panique qu'il étoufferait avant qu'il n’atteigne ses lèvres. C'est aussi lentement que sa mémoire lui rendit quelques souvenirs amers a moitié effacé par le temps.
A la place de ça son regard s’agrandit et ses pupilles s’étrécissent en fixant la jeune femme.

"Daeros?..." Murmure ses lèvres d'un souffle.

L'impression de Fanellia sur cet être le rassura à peine et passa son visage de la stupeur figée à une anxiété marquée:

"Ouais en dehors des excommuniés du village, qui penserait trouver au phare un abri pour la nuit... Ha oui... le mec que j'ai sauvé ce matin. Tu te souviens du gars qui s'est retrouvé sur la plage en même temps que moi?... voilà."

Repartir sur la discussion parallèle à leur relation lui sembla assez hors norme comparé à la gravité du sujet abordé. Fanellia n'était une fois de plus pas en sécurité, même si ce taré vivait dans un phare, il était sur l'île.

Le regard de Raphaël se détourna sur le bâtiment en même temps que son échine se tortionnaire pour l'observer d'un air grave et inquiet.
Fanellia posa sa question sur leur relation, semblant invoquer en lui une certaine fatigue.

"J'sais pas! T'as pas eu l'impression que notre discussion de la dernière fois était assez révélatrice?
Toi et moi nous avons été amant.
Là c'est plus parlant? Je ne voulais pas te brusquer ou t'obliger à quoi que ce soit en te le disant aussi brutalement que maintenant... Ayant perdu la mémoire les sentiments qui se sont crées à une époque et qui ne sont plus en toi pourraient te sembler carrément étrange dit de ma bouche.
Et sur cette île nous sommes différents des autres parce que nous avons un passé commun et que nous nous retrouvons... Et que ce passé commun n'avait pas un fond de destruction l'un envers l'autre. On est dans la même merde.
J'étais là pour te protéger, contrairement à ce que je crois me souvenir de Daeros et... de ceux qui l'entouraient contre toi... D'une façon ou d'une autre..." Raphaël se perdit dans ses explications, se sentant plus fermé et renfrogné à l'idée que ses projets futurs fussent si brutalement modifiés.

Son regard se perdit sur l'horizon à l'opposé de Fanellia et du bord de la plage, soupirant en tentant de retrouver son calme:

"Excuse-moi... je... J'pensais pas que même sur une île déserte j'serais poursuivit par.. mes démons et mes emmerdes." Son regard se blasa sur son dernier propos sans qu'il ne le justifie se sentant déjà décapité.
*Mes amours, mes emmerdes? Des efforts qu'y disait... des efforts.*

Fanellia ne s'était pas attendu à une telle réaction de la part du médecin. Brusquée, elle avait eut un léger mouvement de recul retirant son appui de sa main qu'elle ramena vers elle, le poing serré contre son cœur. Elle s'était redressée son attention ne dérivant pas de celle du jeune homme. Il semblait soudain si agacé, troublé même... Mais qu'est-ce que cela cachait... est-ce que lui et Daeros avait eut un différent ? La suite des propos lui indiqua que le cas semblait plus grave encore. A l'entendre parlé le monde entier était contre eux... contre lui...

Fronçant les sourcils, elle baissa le regard sur ses genoux, serrant les lèvres comme pour retenir un commentaire.
*Beaucoup se prétendre avoir été mon amants...*
Bien sûr il serait si simple de s'en tenir aux propos de Raphaël... Daeros était un être maléfique après tout... mais... ses mots, sa tendresse... Fanellia n'était pas encore prête à le condamner. Détournant la tête, elle pivota son corps pour retourner à sa position initiale, remettant une distance entre eux.

Laissant un silence passer, elle secoua doucement la tête, refroidit par la douche que représentait le flot de paroles qu'il lui avait précédemment versé.
« Je... » elle sembla hésiter : 
« Les gens... ne m'adresse presque jamais la parole... au quotidien... mes discussions se limite aux plantes que je fais grandir... alors désolée de ne plus comprendre les sous entendus et autres discussions du genre. » Ca au moins, elle voulait le mettre au clair! Sans doute était-elle naïve, sans doute était-elle peut être trop innocente mais dans ce monde où chaque non-dits pouvait vous coûter la vie...

Passant nerveusement une mèche de cheveux derrière son oreille, elle se figea, semblant choisir le moindre des mots qui viendrait :
« Je n'ai pas beaucoup parlé avec ce Daeros... je sais juste qu'il est dangereux par nature... Il ne m'a fait aucun mal et n'a pas cherché à me revoir même s'il en a la possibilité. » Considérant que le sujet était clos le concernant, elle se contenta de se lever. Retrouvant en partie son assurance elle le regarda :
« Même si tout semble te poursuivre... cette île regorge de possibilités qui peuvent te rendre maître du jeu à tout instant. Ceux que tu crains t'ont-ils seulement déjà contacté ? La vérité c'est qu'ici... tout peut être bouleversé... des gens gagnent des pouvoirs d'autres en perdent... Tu es ici depuis plus longtemps qu'eux non ?... Alors profites de ton avance. »
Se tournant vers lui, elle ignorait ce qu'il redoutait vraiment, ne le cernant vraiment pas. Elle laissa le silence se faire quelques minutes avant qu'elle ne demande plus doucement :
« Est-ce que tu veux que je parte ? » cette question incluait que ce départ s'il était souhaité inclurait bien plus que celui de ce soir. Après tout peut être qu'il la mettait dans le lot des problèmes qui le poursuivaient ?

Raphaël savait déjà qu'il allait regretter son geste. A l'instant où ses paroles avaient déferlés sans censure au travers de ses lèvres, déliées par une langue encore sous tension.
Lui qui s'était mis en tête que tout allait bien se passer finalement, deux jours sur cette île et hop? Ce serait le paradis et le retour à la nature? Tsss, la grande désillusion. Quelle connerie surtout d'y avoir cru un seul instant.

Tiquant contre lui-même il reteint un soupir exaspéré et en revint à ses oursins préférés.
Et d'ailleurs en en revenant sur cette pensée que Fanellia émettait sans que Raphaël ne puisse percevoir quoi que ce soit, si plusieurs se prétendaient être amants à sa cause elle aurait surement de quoi se poser de sérieuses questions sur un passé de débauches, nan?
Une blague qui aurait bien fait rire le médecin... lui qui savait de quoi il parlait et se souvenant plutôt bien de qui était Fanellia avant l'île et...

La reprise de parole de la jeune femme, derrière sa réaction, le fit culpabiliser au point que son regard se masqua derrière ses paupières et sa nuque relâcha une légère tension.
Il redressa sur elle un regard plissé par une sorte de compassion sincère.

"Ce... c'est rien." finit-il par lâcher. Au moins s'était dit, il n'y avait plus de sous entendu.
Ce qu'elle lui révéla sur sa rencontre avec Daeros ne fut pas pour le rassurer d'avantage et il ne savait pas s'il voulait en entendre plus, pour ne pas se bouffer le sang. Patauger dans un marais gluant de problèmes à résoudre sans savoir comment s'y prendre, organiser une stratégie défensive et sûre...
Il lui fallait le temps... le temps de réaliser tout ce qui venait de se passer en deux jours.
Cette nouvelle vie qu'il n'avait pas demandé alors qu'il se plongeait plutôt dans l'ombre froide d'une certaine entité, ce besoin si soudain de se refaire la famille qu'il avait perdu et le retour de Fanellia.

C'était un peu trop pour ce qu'il s'était infligé peu avant son départ du port, et juste avant son naufrage. Sa dernière cuite ne remontait pas à si loin, si on effaçait celle de sa première nuit sur l'île.
Raphaël n'était décidément plus l'homme qu'il avait été... Son arrivée sur Daimos, la découverte d'un frère, son attirance toute particulière pour Fanellia dans son état sentimentale rechignant toute compassion pour les larmes féminines qu'il aimait provoquer... Cette guerre sur un autre monde.
Et tout s'était enchainé si vite pour son malheur. Sa solitude brutale... sa lente déchéance.
Il ne pouvait pas sauter à pied joint dans le fond de son lac pour espérer reprendre son souffle si facilement.
Pour Raphaël tout était un problème... dans ce retournement de situation qu'il ne savait pas gérer.

Il masqua son regard en détournant le visage, laissant quelques mèches blondes retomber devant ses yeux.

"Tu as de la chance dans ton malheur de ne pas vivre avec ton passé sur le dos, même s'il tente de te rattraper."
Il aurait bien voulu se fracasser le crâne contre un rocher si ça avait pu lui rayer le disque dur pour masquer son passé.
Raphaël crispa ses mâchoires, ne souhaitant pas en révéler d'avantage sur la faiblesse qui commençait à relâcher sa pression.
Il était au bord de craquer avec ses oursins entres les mains et lorsque Fanellia lui proposa de partir il ne su quoi répondre dans son état minable.
Raphaël se sentait tomber dans une vague d’automutilation dont il ne voyait pas la fin. Le retour aux bonnes habitudes de ces derniers mois.
Est-ce cette journée fatigante? Le soleil tapant sur son crâne? Un manque de vitamines? Ça surement... ça y participait pour le moral.

Mais à côté de ce qu'il avait eu l'impression d'endosser sur ses épaules sans avoir rien pu maîtriser ce n'était rien.

Fanellia regardais Raphaël s'enfoncer sans qu'elle n'ai rien a dire de plus. Haussant un sourcil, elle resta quelques instants perplexe... Mais qu'est-ce qui lui prenait ? Un instant il jouait les types décontractés, sûr de lui... et celui d'après, on aurait dit que toute la misère du monde s'abattait sur ses épaules... Tout ça à l'évocation du nom de Daeros. Quel étrange lien s'était tissé entre eux ? En tout cas, cela semblait assez important et dangereux pour que le jeune homme s'en trouve si facilement ébranlé... Raphaël aurait-il été la victime de Daeros ? Si c'était le cas alors il aurait du sentir la présence du vampire... à moins que ce dernier ne l'ai jamais mordu ?

Regardant le médecin aussi blasé, elle ne savait pas vraiment comment réagir... Devait-elle le laisser la ?... Non après tout il ne s'était pas vraiment montré agressif, on aurait même pu dire qu'il avait en quelque sorte chercher à s'excuser silencieusement ? Regardant de part et d'autre d'eux, elle tergiversa. Au fond peut-être avait-il juste besoin de réconfort ? Prise d'une bouffée d'affection à son égard, elle se ravisa dans sa pensée. Lui faire un câlin comme ça de la sorte, sans même prévenir... C'était sans doute un peu trop...

Soupirant, elle finit par s'approcher doucement, posant une main réconfortante sur son épaule. S'abaissant pour laisser son visage à hauteur du sien, elle dit d'une voix radoucie :
« Allez viens avec moi... Le soleil se couche... et j'ai comme l'intuition qu'un peu de viande te ferai vraiment du bien. » Lui souriant doucement, elle lui tendit son autre main dans une douce invitation, puis écartant du bout de son nez quelques mèches blondes, déposa en toute amitié ses lèvres contre la joue du jeune homme. Elle espérait avoir su lui donner le réconfort qu'il attendait et que lui-même s'adoucirait et la suivrait pour se détendre.

Raphaël resta figé quelques secondes sans se préoccuper du vent qui chatouillait sa chevelure asséchée par le climat océanique. Les embruns rendaient sa peau salée et rêche, la fatigue palpable. Le médecin n'était pas un habitué de ce genre d'air et l'énergie lui manquait rapidement à son contact, comme pour tous.

Il releva lentement le visage vers Fanellia sans que son regard ne se détache de l'eau aux reflets hypnotisant, luisante et dansante sur un sable blanc. Lorsque ses iris se reposèrent enfin sur la jeune femme, plongeant son regard dans le sien, il esquissa un sourire plus timide avant de répondre:

"Oui... Un peu de protéine animal peut-être... ça me fera du bien, merci." achève-t-il en se levant de son rocher, emportant avec lui ses épines d'oursins.

Dos au soleil qui continuait sa course dans le ciel, il avança dans l'eau calme et sans vague du boird entre les rochers pour rejoindre la 'terre ferme' et attendre la suite de la route.
Il planifiait dans son esprit la suite des choses à faire... dont la plus importante, trouver de l'argile.

"Dis-moi..." commence-t-il dans un presque murmuré avant de reprendre de la 'motivation' en relevant les yeux:
"Est-ce que tu connais un endroit avec de l'argile... de l'argile rouge?"

Face au soleil et Fanellia, il détail ses contours souples et sensuels, une silhouette féminine à la chevelure mouvante et gracieuse. Une ombre qu'il connait et qu'il estime... une âme qui l'a percé, un esprit qu'il s'interdit de détruire.
Et c'est cet ordre qui le bloque en partie, ne sachant comment la protéger de lui à certains moments... un naturel dans lequel il a toujours baigné.

Fanellia s'était tranquillement redressée, le devançant de quelques pas, elle marchait au sec, profitant des embruns emporté par la brise du soir. Fermant parfois, les yeux, elle prenait son temps, ayant pris l'habitude au fil des années à ce climat si capricieux de l'île. A sa question, elle se retourna tranquillement :
« De l'argile rouge ?... » elle porta son index à son menton, ses yeux cherchant dans le vague la réponse qu'elle pourrait lui fournir... Lâchant son menton, elle leva son index comme un élève de primaire ayant la réponse :
« Oui ! Aux dolmens... peu de personnes y vont... mais le sol est composé d'anciennes strates marines qui se sont surélevées et font suites aux plaines. C'est un endroit plutôt calme... peu fréquenté et inoffensif pour qui y va de jour. Il y a des traces d'une ancienne civilisation... cela ressemble un peu à un lieu de culte... Pourquoi ? » demanda-t-elle tranquillement.

Le laissant la rejoindre, elle reprit tranquillement sa marche, retournant jusqu'à son domicile accueillant... jardin secret caché dans la verdure aux yeux inopportuns. Raphaël verrait pour la première fois sa maison ! Elle l’accueillerait avec autant de confort qu'elle le pourrait, l'installerait dans son petit salon improvisé sur un bon gros coussin rembourré en plumes de parax, tandis qu'elle sortirai la viande qu'elle avait salé et placé dans un endroit frais. Allumant son four, elle ferait ensuite chauffer les plaques de taules déformées qu'elle utilisait pour sa cuisine. Sortant une poêle, elle laisserait la viande cuire dans un peu de graisse végétale l’assaisonnant. Puis enfin... Elle lui proposerait un verre si le cœur lui en disait.

à suivre Invitation et repas